Qui parmi les hakiplayers tourangeaux n’a jamais subi une rechute des zygomatiques, senti son rictus mutin s’évanouir ou couler sur sa joue toute son impuissance devant les éléments, tels la pluie castratrice ou l’impitoyable coucher du soleil ?
Car oui mesdames, messieurs, il existe des contrées où l’on vénère tellement le kick comme art de vie qu’on se refuse à laisser la décision de sa pratique aux seuls caprices des saisons ou des cycles solaires. En bref, il paraît que certains montent des associations et ont ainsi accès à des gymnases pour jouer de tout temps et à toute heure. Pour y remédier chez nous, puisque l’élan associatif pèse par son absentéisme, optons pour le caribou alternatif (c’est le dernier calembour de cet acabit que je me permets dans un post aussi solennel).
Construisons cette alternative : il nous faut un lieu 1) sec, 2) abrité, 3) éclairé et 4) avec une hauteur de plafond suffisante. Nombre de places de l’hypercentre de Tours sont éclairées la nuit mais présentent souvent une lumière qui, en situation de kick, rendrait épileptique même doc Gynéco. Bien que peu économiques, les lampes à halogène restent un choix de qualité dans la prospection urbaine du kickeur. De plus, réunir les conditions de protection des précipitations et de jouabilité verticale est un casse-tête de taille.
Sans aller plus loin, je vous propose ma solution : le pont Wilson (ou « pont de pierre »). Située sous la première arche sud du susnommé édifice, l’arène a été validée grâce à l’installation l’année dernière de lampes halogènes, mais il est tout de même conseillé de choisir un haky clair pour y jouer. La hauteur y est satisfaisante même si on peut toujours trouver pour nous contredire un kickeur aigri dont le style de jeu aérien consiste avant tout à essayer de shooter les martinets.
Allons-y pour les points négatifs :
– Par temps de pluie, quelques flaques viennent parsemer l’arène, mais aucun accident n’a été à déploré à ce jour.
– Si vous connaissez le pont Wilson, vous saurez que c’est le territoire natif des punks à chien et des chiens à punk. Le chien étant l’ennemi naturel du haky (il se sent menacé par lui et tend à éradiquer cette menace en feintant le jeu, sordide créature !), on fera bien attention à tout mouvement de masses de poils considérables (mais ne tapez pas Petrov quand il passe par là).
– Un super-kick bourrin et mal senti pourrait envoyer paître une de nos chères boules de gragnottes dans les tréfonds de la vase ligérienne. Cette situation ne s’est encore jamais présentée à nous.
– Point négatif ou positif selon les points de vues, 4 caméras sont installées aux abords du pont. De quoi rassurer les plus frileux des bords de Loire, qui peuvent craindre des altercations violentes avec les autochtones. De quoi enthousiasmer les adeptes de la performance dont les prouesses sont très certainement gravées sur un disque dur de la police municipale. De quoi mettre en rogne les pseudo-anars libertaires d’ultra-gauche qui peuvent toujours exorciser leur haine gratuite en arborant un doigt majestueux à leur arrivée et à l’adresse des yeux électroniques.
Bien qu’en ce lieu la variété d’ambiances au cours de l’année décline un panel florissant de situations tant banales qu’impromptues, ou convenues qu’incohérentes, il ne devient impraticable que lorsque le kickeur lui-même se laisse emporter par les tentations occasionnelles du lieu, connu pour accueillir des évènements qui peuvent prétexter une mine en bonne et due forme chez l’étudiant de base.
Une écriture bien pompeuse pour un motif pourtant louable : j’espère que cette arène aidera à éviter la si fréquente hibernation du kick lors des saisons froides.